Sous couvert du principe de neutralité, de nombreux Français souhaitent limiter l’extériorisation de toute appartenance religieuse ou culturelle, mais ne se rendent pas compte qu’ils extériorisent constamment leur propre appartenance idéologique et culturelle. C’est justement en présentant leur propre appartenance comme « neutre » qu’ils s’octroient le droit de l’imposer aux autres.
Lorsqu’en France, on exige des minorités de maintenir la « neutralité » (qui est en réalité franco-française), on les contraint à adopter la culture française et son mode de vie. En obligeant les autres à embrasser, sous couvert d’une prétendue neutralité, une nouvelle identité ou une autre apparence, on discrimine les minorités non laïcisées. On les juge et dénigre leurs origines, leur histoire ainsi que les valeurs que leurs parents ont voulu leur inculquer.
Les Français ne comprennent pas que la neutralité qu’ils invoquent n’est pas neutre, et qu’elle incarne également une culture et une croyance spécifique. En considérant l’homme blanc laïc comme « neutre » et « normale », ils nourrissent leur sentiment de supériorité et considèrent les musulmans comme « partial », « anormal » et « inférieur ». La neutralité devient ainsi un moyen pour blanchir l’État de son racisme institutionnalisé.
POURQUOI ABOLIR LA « NEUTRALITÉ » DANS LA FONCTION PUBLIQUE ?
Avec le principe de neutralité, le gouvernement français a trouvé un moyen détourné pour légitimer la discrimination de personnes religieuses souhaitant exercer un emploi dans le service public. Voici 10 raisons pour abolir le principe de neutralité dans la fonction publique :
1. La neutralité — juridiquement parlant — est synonyme d’impartialité. On considère comme neutre la personne qui ne favorise pas l’un aux dépens de l’autre. La neutralité des fonctionnaires signifie donc qu’ils ne font pas de distinctions non autorisées dans leur travail sur la base de l’origine, de la religion, des convictions, de l’opinion politique, du sexe ou de tout autre motif. La neutralité signifie donc principalement que les fonctionnaires accomplissent leur travail de manière objective et impartiale. Ils doivent appliquer les lois à tous de la même manière. Or, dans la neutralité proposée par la République, on favorise clairement les personnes athées aux dépens des personnes religieuses.
2. Il faut juger la neutralité et l’impartialité des fonctionnaires en fonction de leur comportement et de leurs actes, et non sur la base du port d’un symbole ou d’un vêtement religieux.
3. Le postulat selon lequel les personnes visiblement religieuses ne peuvent exercer leur fonction de manière impartiale est non seulement stigmatisant, mais aussi inefficace.
4. Derrière le principe de neutralité se cache la présomption discriminatoire selon laquelle si vous montrez que vous êtes religieux, vous ne pouvez pas agir de manière neutre et impartiale. Or, le cœur de l’interdiction des discriminations est précisément que les personnes doivent être jugées selon leurs actes et leur comportement réels et non selon des suppositions basées sur leur apparence.
5. Lorsque la neutralité est interprétée de manière à ce que les vêtements religieux ne soient pas autorisés, elle exclut des croyants pratiquants de leur participation sociale. Il s’agit alors d’un mécanisme d’exclusion et d’une restriction des droits fondamentaux.
6. Le gouvernement doit en tant qu’employeur vérifier si le candidat satisfait à l’exigence d’impartialité dans ses actes et son comportement. Dans ce cas, la neutralité et l’impartialité sont une exigence qui s’applique à tous les fonctionnaires, quelle que soit leur religion et peu importe si celle-ci est visible par des vêtements ou des symboles. [1]Points 1 à 6 : Conseil des droits de l’homme des Pays-Bas dans sa lettre à la ministre atatürkiste Yeşilgöz.
7. Le principe de neutralité du gouvernement ne remplit plus sa fonction de garant de la liberté religieuse. À l’origine, la neutralité servait de bouclier pour protéger la liberté religieuse : l’État devait être neutre afin que chacun soit traité de la même manière, quelle que soit sa religion (ou l’absence de celle-ci).
8. Aujourd’hui, la neutralité est utilisée d’une manière différente, à savoir comme un argument pour justifier la restriction de la liberté religieuse. On insinue ainsi que la femme ne peut être voilée, car ce serait incompatible avec la neutralité.
9. Le principe de neutralité, qui jadis protégeait contre le totalitarisme de la majorité, est aujourd’hui détourné par la majorité pour discriminer une minorité. En d’autres termes, la neutralité est plus souvent utilisée comme une épée pour combattre la liberté religieuse que comme un bouclier pour la défendre. [2]Points 7 à 9 : « BOEH ! », dixit Stijn Smet & Samira Azabar
10. Le principe de neutralité est devenu le cheval de Troie de la fachosphère française. En approuvant un principe qui discrimine certaines minorités dans le secteur du travail, la France a légitimé leur exclusion de la société. Il est alors tout à fait normal que les ennemis de ces minorités en question exigent que la neutralité soit appliquée dans toutes les situations possiblement imaginables. Le principe de neutralité légitime et dissimule une ségrégation culturelle que les racistes voudront constamment extrapoler à l’ensemble de la société. [3]Kareem El Hidjaazi, « Nègres & islamistes, les convergences d’une lutte culturelle. »
POURQUOI ABOLIR LA « NEUTRALITÉ » DANS L’ENSEIGNEMENT ?
Pour combattre la visibilité musulmane dans les écoles, les élites françaises ne cessent d’invoquer le principe de neutralité. L’exigence de « neutralité aux membres de la société civile » fut un argument clé dans le vote de la loi de 2004 sur les signes religieux dans les écoles publiques (il fallait préserver la « neutralité de l’espace scolaire »). Voici 11 raisons pour abolir le principe de neutralité dans l’enseignement :
11. Estimer que l’appartenance religieuse d’un enfant à l’islam l’empêche de réfléchir par lui-même est une vision raciste et colonialiste des musulmans. Cela implique que les musulmans ne pourront réfléchir par eux-mêmes ou former leurs propres opinions que s’ils délaissent leur identité et adoptent la culture de l’homme blanc, considérée comme supérieure. On part du postulat que croire au Créateur et pratiquer une religion ne peut être une « propre opinion ».
12. Cela implique également que seuls les non musulmans, de par leur athéisme, seraient capables de penser par eux-mêmes. L’image raciste du musulman sauvage, arriéré et contraint de pratiquer sa religion par ses parents, est ainsi parfaitement maintenue.
13. Dire que l’école est « un espace neutre » qui aide les enfants musulmans à s’émanciper revient à dire que leur croyance et leur appartenance sont considérées comme anormales, sauvages ou totalement insensées. Le principe de neutralité est ainsi exploité pour stigmatiser les musulmans et dénigrer leur identité.
14. Imposer l’assimilation culturelle sous couvert de neutralité où l’on demande aux élèves de se débarrasser de leur culture et d’en adopter une autre qui est imposée par l’école est un détournement d’esprit, car on leur enlève tout ce qui leur est de plus cher : leur passé, leurs coutumes, leur religion, leurs ancêtres.
15. Dire que le voile est « autodiscriminatoire » et qu’il empêche la liberté de conscience de l’élève est un discours xénophobe. Comment peut-on offrir à une fille musulmane une liberté de conscience si on considère le port du voile de sa mère comme « autodiscriminatoire » ou comme un « élément de propagande » qui « va à l’encontre de la valeur d’exemplarité de l’adulte » ? Une fois qu’on oblige des enfants à se renier culturellement et religieusement, il n’est plus question de liberté de conscience, de culture ou de religion.
16. À quoi bon garantir la liberté des croyances si on est incapable d’offrir la possibilité aux individus de construire librement leur personnalité, et d’arborer une tenue qui est conforme à leur croyance ? À quoi bon avoir un traitement égal des différents cultes, si l’État s’érige comme référent culturel auquel tous les membres des cultes doivent se soumettre en rejetant leur identité ?
17. Avec la neutralité, on estime que les élèves voilées se rendent coupables de « prosélytisme ». Cela revient à leur attribuer un esprit subversif. En pratiquant sa religion, l’élève musulmane cherche forcément à l’imposer aux autres, même si elle ne prononce pas un mot.
18. Inversement, pourquoi les enfants religieux ne seraient-ils pas victimes de « prosélytisme laïque » de la part d’enfants non religieux qui sont non seulement largement majoritaires, mais qui peuvent aussi se permettre d’imposer leur avis comme étant la référence ?
19. À cet âge-là, les élèves musulmanes sont conditionnées à accepter le fait qu’elles ne seront jamais acceptées dans la société avec leur voile. Voilà le message que le concept de neutralité fait réellement passer à la jeunesse musulmane. Si après l’école elles continuent à porter le voile, la société le leur rappellera à l’âge adulte lors des entretiens d’embauche. Durant toute sa vie, la femme voilée subira des pressions pour se dévoiler, tout en étant accusée de prosélytisme.
20. Le principe de neutralité est une conception qui porte atteinte à la cohésion sociale, et qui exclut toute liberté et diversité religieuses dans l’enseignement. Il entrainera forcément des traitements discriminatoires (infligés aux personnes religieuses) d’une part, et des traitements préférentiels (accordés aux athées) de l’autre. Il accorde ainsi le droit aux parents laïques et athées de vêtir leurs enfants selon leurs convictions, alors qu’il l’interdit aux parents musulmans, juifs, etc.
21. (BONUS) Le principe de neutralité engendre de nombreuses formes de dérives et discriminations permettant aux écoles d’exclure les lycéennes musulmanes qui portent une capuche ou une simple jupe longue que les élèves non musulmanes peuvent porter sans être souciées. [4]Points 11 à 21 : Kareem El Hidjaazi, « Nègres & islamistes, les convergences d’une lutte culturelle. »
COMMENT LA « NEUTRALITÉ » INSTAURE UNE SÉGRÉGATION CULTURELLE
En France, le principe de neutralité a permis l’adoption de plusieurs lois islamophobes. Celles-ci n’auraient jamais dû voir le jour, en vertu de l’article 18 de la DUDH qui stipule que « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion », et que « ce droit implique la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites. »
C’est avec le principe de neutralité qu’une ségrégation partielle s’est instaurée dans la société française. Dès lors, il est tout à fait normal que certains souhaitent l’universaliser et en faire une règle qui s’applique à tous ses citoyens. Ladite « neutralité » permet aux les icônes du racisme antimusulman (Zemmour, El Rhazoui…) d’exiger une ségrégation culturelle totale. Pour eux, la « neutralité » doit être prescrite partout, et à tout moment.
Avec le principe de neutralité, le français de souche laïc finit par simplifier excessivement le monde qui l’entoure et devient incapable de reconnaitre que d’autres cultures peuvent être enrichissantes.
Le défi principal dans le combat contre l’islamophobie en France se trouve aujourd’hui dans l’abolition de cette conception de la neutralité qui sert de prétexte pour « exclure légalement » les musulmans visibles de la société.
Références
↑1 | Points 1 à 6 : Conseil des droits de l’homme des Pays-Bas dans sa lettre à la ministre atatürkiste Yeşilgöz. |
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↑2 | Points 7 à 9 : « BOEH ! », dixit Stijn Smet & Samira Azabar |
↑3 | Kareem El Hidjaazi, « Nègres & islamistes, les convergences d’une lutte culturelle. » |
↑4 | Points 11 à 21 : Kareem El Hidjaazi, « Nègres & islamistes, les convergences d’une lutte culturelle. » |