À l’époque coloniale, l’ingérence militaire, politique et culturelle de l’Occident fut combattue par un Jihad armé et intellectuel. Des noyaux de résistance virent le jour en Indonésie, en Inde, en Égypte, en Palestine, en Algérie, au Maroc, en Irak, en Syrie, en Libye, au Soudan, au Caucase et ailleurs. Dans leur lutte contre l’occupant, les musulmans alternaient l’épée avec la plume pour mettre fin à l’agression coloniale, l’hypocrisie évangélique et la barbarie sioniste.
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Le Jihad armé fut une forme de résistance effective et très redoutable contre l’occupation coloniale à laquelle les Britanniques ripostèrent en usant d’un stratagème ingénieux. Ils envoyèrent des délégations dans leurs colonies à la recherche de traitres prêts à vendre leur religion, âme et foi. Les agents sélectionnés étaient alors formés et préparés à devenir des dirigeants de sectes entièrement manipulables qui appellent la population locale à l’abolition du Jihad. En Iran, les colons anglais trouvèrent Mirza Housein ‘Ali (mieux connu sous le nom de Bahâ Allah) avec qui ils fondèrent la secte d’al-Bahâ’iya. Mais comme Bahâ Allah n’arriva pas à contenir et dissimuler sa haine envers l’islam, la secte aboutit très vite à un échec.
En Inde, les colonisateurs anglais connurent plus de succès. Ils y embauchèrent Ghulâm Ahmed al-Qadyâni (1835-1908) qui, sous supervision britannique, instaura la secte d’al-Qadyâniya, aujourd’hui connue sous le nom d’al-Ahmadiyya[1]C’est en Afrique et en Occident que la secte a adoptée le nom d’al-Ahmadiya. L’occupant britannique soutint Ghulâm Ahmed et ses adeptes par des moyens financiers considérables. Des employeurs indiens qui devaient auparavant se contenter d’un salaire mensuel de cinq livres sterling touchaient maintenant chez Ghulâm une paye de plusieurs centaines de livres par mois. Le tout, bien entendu, grâce à la « baraka » de la colonisation.
La secte Qadyanite fut sous emprise totale des autorités anglaises qui la contrôlèrent également de l’intérieur. De nombreux membres du gouvernement britannique furent membres de la secte, comme l’admit ouvertement Ghulâm al-Qadyâni :
Mon organisation contient surtout des membres du gouvernement britannique qui occupent de hautes fonctions ainsi que des marchands en gros. Nous avons également de nombreuses personnes qui ont étudié l’anglais et des scientifiques qui ont fourni des services aux Britanniques. Pour résumer, mon mouvement consiste d’individus qui ont été formés par les autorités britanniques et dont elles sont satisfaites. Moi-même ainsi que les savants qui me suivent, nous avons clarifié au peuple la grande bienfaisance des Britanniques à notre égard et nous avons propagé cette reconnaissance dans les cœurs de milliers de personnes.[2]Ghulâm al-Qadyâni lors d’un discours devant le gouverneur provincial britannique de Panjab, Tabligha Risâlât, vol.7, p.18
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Plusieurs branches de la Qadyâniya surgirent dans les pays arabes et africains où ils opérèrent en tant que centres des services secrets britanniques. Avec la création d’une secte internationale dite islamique, les Britanniques parvinrent à infiltrer les mouvements de résistance avec un réseau d’espionnage efficace pour saboter le Jihad armé.
Les membres de la secte d’al-Qadyâniya furent tellement anglophiles que plusieurs centaines d’eux rejoignirent l’armée britannique. À chaque fois qu’un pays musulman tomba sous occupation coloniale, les Qadyanites exprimèrent leur joie en offrant un somptueux festin. Toute victoire pour le colonisateur fut considérée comme étant une victoire pour eux et un nouvel espoir d’inviter les gens aux idées de leur secte. Lors de la chute de l’Empire Ottoman, le journal officiel de la secte publia la déclaration suivante :
Nous remercions Allah un million de fois pour cette victoire britannique. Il s’agit pour nous d’un évènement euphorique, car notre imam (Ghulâm al-Qadyâni) fit de nombreuses invocations pour que cette victoire ait un jour lieu. Ce grand triomphe nous a d’ailleurs offert une nouvelle opportunité d’inviter les gens à la croyance Qadyanite, ce qui fut jusqu’à présent impossible. Tout ceci est devenu possible grâce à l’expansion du Royaume Britannique. [3]Jarîda al-Fadl, 22 novembre 1918..
D’autre part, Ghulâm al-Qadyâni ordonna aux musulmans de jurer leur loyauté aux colons britanniques qui furent, selon lui, les « califes bien guidés sur terre ». Très vite, des fatwas furent émises par les savants musulmans autorisant l’assassinat de Ghulâm. Mais comme ce dernier fut tellement bien protégé par le colon anglais, cela n’a jamais eu lieu.
Après avoir rallié un grand nombre de partisans, Ghulâm al-Qadyâni se déclara prophète et prétendit recevoir des révélations du ciel. Voici une des premières « inspirations divines » de Ghulâm :
À partir d’aujourd’hui le commandement divin du Jihad armé est aboli. Celui qui, à partir de maintenant, prend encore les armes et se nomme guerrier vivra en contradiction avec le Messager d’Allah. En effet, le Prophète avait annoncé l’abolition du Jihad avec la venue du Messie attendu[4]Il s’agit, bien entendu, d’un mensonge éhonté., et le Messie c’est moi ! Voilà pourquoi il n’y a plus de Jihad armé. [5]Ihsân Ilâhi Dhahîr, « Al-Qadyâniya, Dirâsât wa Tahlîl », p.118.
En ignorant que Ghulâm fut un pantin manipulé, on aurait pu penser qu’il s’agisse d’un don tombé du ciel pour les Britanniques. Dans un autre discours, le gourou de la Qadyâniya déclara le Jihad comme étant une croyance impure :
L’organisation Qadyanite ne cessera de se battre, jour et nuit, pour extraire et éradiquer cette croyance impure, la croyance du Jihad, des cœurs des musulmans. [6]Ibid., p.119.
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Le prêche anti-Jihad de Ghulâm fut largement propagé par les Britanniques dans leurs différentes colonies. En tout, Ghulâm al-Qadyâni avait appelé les musulmans durant 22 ans à abandonner le Jihad contre l’occupant anglais. « Et quel pire injuste que celui qui fabrique un mensonge contre Allah ou qui dit : “Révélation m’a été faite”, quand rien ne lui a été révélé. » (al-An’âm, 6)
De façon similaire, les Français menèrent une campagne contre le Jihad armé dans l’espoir de maintenir leurs colonies. Au Sénégal, ils sélectionnèrent méticuleusement des porte-paroles de la secte Tijanite qu’ils financèrent et décorèrent pour étouffer toute forme de résistance armée. En 1914, le dirigeant de la Tijaniya al-Hadj Malick Sy (1855-1922) déclara que la résistance contre l’occupation française était une désobéissance à la volonté de Dieu :
N’écoutez pas ceux qui vous demandent de vous opposer à la France, car seuls vos pires ennemis oseraient vous demander cela… Prenez garde de vous opposer au gouvernement français, ne serait-ce que dans la plus petite des affaires… Obéissez et soumettez-vous à la volonté de Dieu, qu’il soit exalté, car Dieu punit Ses créatures pour leurs péchés et leur injustice. [7]David Robinson, « Le temps des marabouts. Itinéraires et stratégies islamiques en Afrique- Occidentale Française v. 1880-1960 », p.195.
Aboubacar Sy fut le fils et successeur de Malik Sy, mais préféra se nommer « fils des Français ». Il manipulait des versets coraniques pour justifier son appel à une fidélité esclavagiste à l’homme blanc :
Faites confiance aux Français, comme ils vous font confiance. ‘La rémunération du bienfait est-elle autre que le bienfait ?’ [8]Surate al-Rahmân, 60 Nous n’avons pas le droit de nous révolter contre les conseils de l’administration (française), car nous lui devons tout… Il est dit dans le Coran que celui qui se révolte contre un bon maître ira en enfer. Nous sommes fils de Français et nous resterons Français… [9]Fabienne Samsom, « Les marabouts de l’islam politique. Le Dahiratoul Moustarchidina Wal Moustarchidaty, un mouvement néoconfrérique sénégalais », p.183.
Les Ahmadiyyas sont loin d’être l’unique secte à avoir été fondée, soutenue ou financée par les (néo-) colonisateurs. En Occident, la secte coloniale la plus récente fut entièrement instaurée par le gouvernement français en 2003 après avoir été baptisée « islam de France » par Bruno Etienne[10]Voir “Le Crime Islamologiste”. Bien que le gourou de la secte, Dalil Boubakeur, n’ait pas encore clamé sa prophétie, il a néanmoins rédigé des proclamations qui abrogent de nombreux versets coraniques et de traditions prophétiques. À l’instar des agents Qadyanis et Tijanis à l’ère coloniale, Boubakeur estime que résister à la laïcisation de l’islam est un péché capital qui vous emmènera directement en enfer. Une fois de plus, l’Histoire se répète…
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Jihad Et Colonialisme (Luca… by Kareem El Hidjaazi
Références
↑1 | C’est en Afrique et en Occident que la secte a adoptée le nom d’al-Ahmadiya |
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↑2 | Ghulâm al-Qadyâni lors d’un discours devant le gouverneur provincial britannique de Panjab, Tabligha Risâlât, vol.7, p.18 |
↑3 | Jarîda al-Fadl, 22 novembre 1918. |
↑4 | Il s’agit, bien entendu, d’un mensonge éhonté. |
↑5 | Ihsân Ilâhi Dhahîr, « Al-Qadyâniya, Dirâsât wa Tahlîl », p.118. |
↑6 | Ibid., p.119. |
↑7 | David Robinson, « Le temps des marabouts. Itinéraires et stratégies islamiques en Afrique- Occidentale Française v. 1880-1960 », p.195. |
↑8 | Surate al-Rahmân, 60 |
↑9 | Fabienne Samsom, « Les marabouts de l’islam politique. Le Dahiratoul Moustarchidina Wal Moustarchidaty, un mouvement néoconfrérique sénégalais », p.183. |
↑10 | Voir “Le Crime Islamologiste” |